Alexandra Champion et Amandine Louis

D’où vient l’idée de créer Elle Cartonne ?

C’est la rencontre de deux parcours : Alexandra Champion, professionnelle de l’insertion, et Amandine Louis, forte de 15 ans en logistique. Nous constations respectivement le manque de femmes dans certains parcours et le gaspillage des cartons.
Amandine — Mon idée de départ était de créer une économie circulaire locale avec des cartons d’emballage. Je voulais utiliser cette démarche comme levier de retour à l’emploi pour les publics fragilisés.
Alexandra — Évoluant dans l’insertion, j’avais remarqué l’absence de femmes dans le secteur de la logistique, notamment en parcours d’insertion où il est possible de débuter sans beaucoup de qualifications professionnelles.

Comment avez-vous réussi à relier vos parcours ?

Nos deux parcours complémentaires ont finalement révélé une vision commune : favoriser l’insertion professionnelle des femmes éloignées de l’emploi et participer à la transition écologique. Notre objectif est que le réemploi serve à réduire les inégalités entre les femmes et les hommes par le prisme de l’emploi.
Amandine — Je connais bien les enjeux de la logistique et les attendus sur les différents métiers. Ma compétence managériale et mon expérience m’apportent une expertise essentielle pour encadrer les femmes et transmettre.
Alexandra — Je suis issue du secteur de l’insertion professionnelle des publics éloignés de l’emploi, je possède un large réseau et une bonne connaissance des dispositifs. Ma première expérience professionnelle en marketing m’apporte des compétences complémentaires dans la gestion de projet.

À qui s’adressent vos services ?

Pour le volet réemploi, nous ciblons les particuliers et les entreprises, TPE et PME. Ils recherchent des solutions locales et écologiques pour s’approvisionner en cartons. Pour le volet insertion, nous nous adressons aux femmes peu ou pas diplômées de la Métropole de Lyon. Nous les formons aux métiers de la logistique dans leur parcours de retour à l’emploi.

Quel est l’impact environnemental d’Elle Cartonne ?

Elle Cartonne est la première solution de réemploi de cartons sur la Métropole de Lyon. Nous favorisons l’économie circulaire du territoire en proposant un service de collecte de cartons auprès des entreprises locales. Nous participons ainsi à réduire les déchets et l’impact environnemental du territoire. Depuis 2024, ce sont déjà plus de 3000 cartons réemployés, soit environ 3 tonnes de CO2 évitées. Notre service de collecte aide les entreprises à limiter leurs déchets pour répondre aux objectifs de la loi AGEC anti-gaspillage. Après une valorisation, nous proposons aux particuliers et aux professionnels d’acheter des cartons de réemploi, au service d’un projet d’utilité sociale.

Comment contribuez-vous à l’insertion professionnelle des femmes ?

Nous accueillons des femmes en immersion pour leur faire découvrir les métiers de la logistique et les faire monter en compétences. La logistique est un secteur professionnel en tension, peu féminisé, mais pourtant pourvoyeur d’opportunités professionnelles. Nous favorisons l’insertion professionnelle des femmes de la Métropole de Lyon, exposées aux inégalités, notamment celles issues des quartiers politiques prioritaires ou pas diplômées. Les femmes, moins nombreuses en parcours d’insertion, sont majoritairement orientées vers des métiers du « care » et des contrats précaires. Nous luttons donc contre les stéréotypes de genre et élargissons les choix professionnels par la découverte de la logistique. Nous agissons contre les inégalités que subissent les femmes en situation de précarité. À travers notre activité de réemploi, les femmes reprennent confiance en elles, retrouvent leur pouvoir d’agir et gagnent en indépendance. 

Quels sont les défis auxquels vous faites face actuellement ou ceux que vous avez dû relever ?

Au démarrage, notre principal défi a été de trouver des subventions et des mécénats pour nous soutenir. Nous avons aussi dû nous entourer, car on ne maîtrisait pas toutes les compétences nécessaires au bon fonctionnement d’une association. Nous avons donc décidé de nous appuyer sur un conseil collégial d’anciennes dirigeantes de PME. Aujourd’hui, l’enjeu est de solidifier notre structure et de consolider nos partenariats pour renforcer les liens au niveau local.

Quels soutiens avez-vous reçus pour créer votre association ?

Nous avons reçu de nombreux soutiens :

• L’accompagnement par Ronalpia, un incubateur de l’ESS, lors de la création de l’association. 
• Nous avons créé un partenariat avec Bross Up, une entreprise du Territoire Zéro Chômeur, pour faire découvrir l’activité de valorisation de cartons à ses salarié·e·s. 
• Nous avons mis en place un partenariat avec Alstom à Villeurbanne pour l’apport volontaire de gisements réguliers de cartons. 
• En janvier 2025, nous avons intégré le programme Bâtir Demain d’Alter Incub, incubateur d’innovation sociale pour bénéficier d’un accompagnement de 24 mois. 
• Nous nous sommes entourées d’un conseil collégial pour assurer la conduite collective des projets et la mise en place des nouvelles orientations et actions. Les membres de ce conseil sont deux anciennes directrices générales de PME. 
• La ville de Villeurbanne et la métropole de Lyon nous soutiennent également et nous apportent leur réseau pour nous faire connaître. 
• Nous recevons le soutien du Club d’investisseurs Cigales.

Comment allez-vous utiliser la dotation remportée ?

Cette dotation nous aidera à mener à bien notre action d’insertion auprès des femmes éloignées de l’emploi. Nous proposons plusieurs parcours d’immersion sur mesure aux femmes selon leurs problématiques. Cette dotation nous aidera à la mise en place des ateliers sur les thématiques de l’insertion professionnelle pour les 25 femmes que nous souhaitons accueillir en 2026.

Quel message aimeriez-vous transmettre aux entrepreneuses qui se lancent ?

Prenez le temps de structurer votre projet en vous posant les bonnes questions, et surtout, ne restez jamais seule·s. Entourez-vous de ressources de qualité qui sauront à la fois nourrir votre ambition et la challenger. Les incubateurs et les réseaux entrepreneuriaux comme Femmes des Territoires offrent un regard extérieur et poussent à confronter ses idées. C’est cette diversité des points de vue qui permet de prendre du recul et de faire grandir son projet !